En cette Grande semaine des tout-petits, il est essentiel d’attirer l’attention sur un enjeu désormais reconnu comme prioritaire au Québec : l’exposition des jeunes enfants aux écrans. La Commission spéciale sur les impacts des écrans et des réseaux sociaux sur la santé et le développement des jeunes a tiré une conclusion claire : la place des écrans dans la vie des enfants est un enjeu de santé publique majeur.

Les partis politiques provinciaux, les professionnels de la santé, les acteurs en petite enfance et le milieu communautaire partagent ce constat. Il est maintenant temps d’agir.
 

Des chiffres alarmants

Aujourd’hui au Québec, plus de la moitié des enfants de maternelle sont surexposés aux écrans. Selon une enquête de 2022, 52 % des enfants de 5 ans ne respectent pas la limite d’une heure maximum d’écran par jour recommandée par la Société canadienne de pédiatrie. Plus préoccupant encore, dès 17 mois, un enfant sur quatre passe du temps devant les écrans en semaine — et plus d’un sur trois la fin de semaine — alors que les écrans ne devraient pas être utilisés avant l’âge de deux ans.

Ces chiffres, bien qu’alarmants, ne surprennent pas : les écrans font partie du paysage familial. Ils servent à divertir, calmer, occuper, informer. Ils sont devenus des outils du quotidien, mais souvent au détriment du développement des tout-petits. Les enjeux liés à une surconsommation précoce sont nombreux : faibles habiletés sociales, contrôle émotionnel et comportemental fragile, difficultés d’attention, pour n’en nommer que quelques-uns.

C’est pourquoi soutenir les familles est essentiel. Les parents ne doivent pas être blâmés : ils ont besoin d’outils, de soutien et d’un environnement social qui valorise le lien humain plutôt que la distraction numérique. Les écrans sont une responsabilité partagée.

Les 0-5 ans : une fenêtre de développement à protéger

La petite enfance est une période critique, où le cerveau se construit à une vitesse fulgurante. Les enfants apprennent par l’interaction humaine, par le regard, le geste, la parole et l’exploration concrète du monde.

Or, la littérature scientifique et l’expérience terrain montrent une réalité préoccupante : ce n’est pas seulement l’utilisation des écrans par les enfants qui peut influencer leur développement, c’est aussi l’usage des parents. Lorsque le cellulaire accapare l’attention, l’écran prend la place de l’interaction. Il vient à remplacer les échanges, les regards, les jeux ainsi que les moments d’émerveillement et d’apprentissage partagés avec le parent.

Reconnaître, puis agir

La Commission spéciale a marqué un tournant important en reconnaissant la gravité de la situation et en soulignant qu’intervenir tôt est essentiel. Nous saluons cette prise de conscience politique transpartisane.

Mais le constat ne doit pas rester sur papier. L’action doit suivre, et rapidement pour le bien des 0-5 ans, dont le développement ne peut être mis sur pause en attendant des mesures.

Avant même le dépôt officiel du rapport, Boscoville a amorcé la création d’un programme novateur dédié aux parents de jeunes enfants et leurs communautés, afin de favoriser une santé numérique positive dès la naissance. Ce programme, développé en partenariat avec les organismes signataires de cette lettre, sera expérimenté en milieu réel dès 2026. Il répond directement à 10 des recommandations de la Commission sur les jeunes et les écrans, dont :

  • la sensibilisation des familles et intervenants;
  • la création de ressources concrètes pour soutenir des habitudes saines;
  • le renforcement des compétences parentales à l’ère numérique;
  • le soutien accru aux milieux vulnérables;
  • la promotion d’activités et d’environnements sans écran.

Reconnectons-nous à l’essentiel

En cette Grande semaine des tout-petits, rappelons-nous que nous avons tous le pouvoir de rétablir un équilibre sain entre le numérique et la vie réelle. Pour le bien de nos tout-petits, débranchons les écrans et connectons-nous à nos enfants.

Organisme signataire

Annie Fournier, Directrice générale, Boscoville

Organismes co-signataires

Geneviève Blanchard, Directrice générale, Affaires publiques et gouvernementales, AQCPE

Elise Bonneville, Directrice, Collectif petite enfance

Guy Desrosiers, Président-directeur général, Capsana

Frédéric Therrien, Directeur général, M361

David Buetti, Ph. D., Professeur adjoint, Département de gestion, d’évaluation et de politique de santé, École de santé publique, Université de Montréal